Ce texte est la copie d'un original encadré dans le local de la section.
Promotion capitaine Bergot.
Erwan Bergot
est né à Bordeaux le 27 janvier
1930.D'ascendance
bretonne,il est nettement marqué par le caractère de sa race,portée à la fidélité et au courage comme à la ténacité et à la spiritualité.Elève des Jésuites,il fait chez eux de brillantes études
qui le ménéraient au Séminaire,car il est animé par une foi profonde,ou à une licence de Lettres,si son tempérament d'homme d'action ne lui faisait préférer un engagement plus physique.
Une préparation militaire supérieure lui ayant fait découvrir les parachutistes il opte tout naturellement pour cette Arme quand il est appelé au service militaire en 1949.Nommé aspirant à
l'issue du stage des Officiers de réserve à Saint-Maixent,il va faire son "temps" au 11eme Bataillon de Choc basé à Mont-Louis.A la fin du service légal,ayant mesuré auprès de cadres prestigieux
et dans des activités physiques variées ce qu'était la vie militaire,il ne résiste pas à l'exemple de ses camarades d'active qui partent pour l'Indochine.L'aspirant Bergot considère que son
devoir de Français est de continuer à servir la-bas.
C'est comme ORSA(officier de réserve en situation d'activité) qu'il débarque à Saïgon en Juillet 1951.Affecté au 22eme régiment d'Infanterie coloniale à Bien-Hoa,dans l'est cochinchinois,le
sous-lieutenant de réserve va "apprendre" sur le tas,au contact de sa troupe autochtone,les particularismes de cette guerre et de cette population.Malgrè le caractère un peu décevant de
cette affectation bien terre à terre pour un féru du "choc"et du parachute,Bergot va contracter là le "mal jaune",cette attirance insurmontable pour un pays et ses habitants qu'il n'oubliera plus
jamais et qui,bien plus tard,seront la source de ses plus grands livres.
Après un an de purgatoire à Bien-Hoa,début
octobre 1952 toujours réserviste,le sous-lieutenant Bergot est muté au Tonkin ou il rejoint le 6ème Bataillon de parachutistes coloniaux du commandant Bigeard.Deux jours après son arrivée,chef de
section à la compagnie Trapp,le bataillon saute en Haute-Région sur Thu-Lé,proie offerte à près de deux divisions vietminhs.Sept heures de combat et trois jours de folle retraite à travers
la jungle permettront à Bigeard de ramener sains et saufs les deux-tiers de son bataillon.Intégré dès cette épreuve de force,Bergot connait enfin la chaleur d'une camaraderie exaltante et
formatrice auprès de son commandant de compagnie comme auprès de ses pairs.Laizé,Ferrari,Datin.Avec eux et comme eux,pendant plus d'un an il participera aux faits d'armes du bataillon
Bigeard,défense du camp retraché de Na-San,opérations du delta tonkinois,coup de main sur Langson au cours d'"Hirondelle".
L'ancien élève des Bons-Pères est devenu un guerrier confirmé et reconnu.Il s'est forgé une réputation de jeune tenace,tout acquis au mode de vie extraverti des officiers parachutistes;mais cette
attitude masque un intérêt profond pour la condition militaire et un attachement de jour en jour plus évident pour ses subordonnés.
En décembre 1953 quand le dispositif de l'opération Castor est en place sur le site de Dien-Bien-Phu,le lieutenant Bergot spécialiste en mortiers ne compte plus sur les effectifs du 6émeBPC mais
sur ceux d'une unité créée pour la circonstance,la compagnie de mortiers lourds des paras de la Légion au béret vert,il va subir tout le long des cent-soixante-dix jours de la bataille de
Dien-Bien-Phu,d'abord accès de fixation puis rapidement siège et choc frontal.L'évacuation du capitaine,la mort de l'officier adjoint font du lieutenant ORSA le seul patron des mortiers
lourds du BEP.En batterie au centre navralgique du dispositif,terriblement exposé aux tirs de l'artillerie ennemie,décimée jour après jour,servant ses pièces dans un cloaque,la CMML va tirer son
dernier obus le dernier jour du siège,le 7 mai 1954,la rage au ventre.Tous les rescapés de la bataille se souviendront avec chaleur de l'efficacité et du dévouement des mortiers de Bergot durant
toute la bataille.
A ces souvenirs heurtés de plus de quatre mois
de combats quasi-permanents,la marche infernale qu'imposent les Viets à leurs onze mille sept cents prisonniers jusqu'aux camps d'internement va rajouter les cicatrices d'un chemin de croix
meurtrier.Comme meurtriers seront aussi les quatre mois passés dans ces camps de prisonniers,sous la férule de commissaires politiques déshumanisés,dans d'atroces conditions de malnutrition,de
misère physique,d'absence d'hygiène et de tentatives de lavages de cerveaux.Classé disciplinaire après une tentative d'évasion avortée,Bergot connaîtra les conditions de captivité les plus dures
avant de faire partie,en septembre,des trois mille neuf cents prisonniers libérés par le Vietminh.
Que sont devenus les huit mille combattants désarmés poussés vers la jungle du nord et qui ne sont jamais revenus?Cette question lancinante que se posent les survivants n'abandonnera plus jamais
l'esprit et le coeur de Bergot,qui en fera,trente ans plus tard le thème d'une de ses plus fortes oeuvres d'écrivain,"CONVOI 42".
Chevalier de la Légion d'Honneur,quatre fois cité,le réserviste BERGOT est rapatrié en France et démobilisé à Bordeaux.A peine a-til le temps de se poser des questions sur l'orientation de son
avenir civil.Le 15 février 1955,il est rappelé pour servir en Algérie.Son affectation au 47ème Bataillon d'infanterie n'est pas de celles qui peuvent enthousiasmer ce baroudeur.Mais il sait
dynamiser ses appelés et les adolescents autochtones regroupés dans un centre de formation qu'il dirige.Il y retrouve le tonus émoussé par la captivité,au point de refuser sa nouvelle
démobilisation, pourtant légale,et de demander une nouvelle fois son activation.Après un nouveau stage à Saint-Maixent,en compagnie de la promotion"Amilakvari"de Saint-Cyr,le lieutenant Bergot
devient enfin officier d'active en 1957.
Du 47ème Bataillon d'infanterie il réussit alors à passer dans une unité plus offensive.Les bataillons de choc se réclamant du 11ème,corps regroupant des agents "Action" travaillant sous l'égide
du SDECE,animent maints commandos implantés en Algérie.Bergot y travaille brillamment avec l'enthousiasme de ses jeunes années,notamment sur la frontière tunisienne,y gagnant encore une
citation,la 6eme déjà.
En avril 1960,après vingt cinq mois de
présence en Algérie,il rentre en France.Le général GILLES,sous les ordres duquel il avait servi à Na-San,le choisit pour servir à son cabinet à Toulouse,d'où il commande la région militaire.C'est
pour le jeune officier qui a toujours servi dans la troupe une prise de contact utile avec le monde extérieur,les états-majors,la presse,l'opinion publique majoritairement peu militariste.A la
mort du général Gilles,en août 1961,Bergot repart sur sa demande pour l'Algérie où il retrouve la Légion étrangère,dans les rangs du 2ème Bataillon étranger de parachutistes ou il sert comme chef
de section.En décembre,au cours d'un accrochage dans le Nord-Est Constantinois,il est grièvement blessé à l'oeil droit;dont il ne recouvrera pas l'usage.
Désormais le combat par les armes d'Erwan Bergot est terminé.Il va néanmoins continuer à servir sous l'uniforme jusqu'en 1965:le capitaine Bergot va être à sa sortie de convalescence en mai
1962,le premier patron de la revue TAM,y découvrant les secrets du journalisme auquel il avait un instant souhaité s'adonner douze ans auparavant.Il y sens aussi éclore son goût très vif pour
l'écriture,au point de publier en 1964 son premier roman"Deuxième Classe à Dien-Bien-Phu"qui rencontre immédiatement le succès.
Fort de ce test réussi,conscient que sa mutilation lui interdira tout retour dans une unité de corps de bataille,il décide alors de quitter l'armée active dont il démissionne en 1965.Son combat
pour l'idéal qu'il a partagé avec tant de guerriers proches de son coeur,il va le continuer dorénavant par la plume.
Alternant et conjuguant celle du témoins,celle de l'historien,et plus tard en pleine
possession de ses moyens,celles du romancier,il va ainsi,en presque trente ans d'écriture,composer une oeuvre de près de cinquante ouvrages,consacrés pour la près grande majorité à ses frères
d'armes et au pays qu'il ne peut oublier,l'Indochine de ses premiers combats."Au départ,écrivait-il,je tenais à rendre hommage à tous les obscurs,les sans-grade,ceux qui n'ont jamais leur mot à
dire dans l'Histoire,et que j'avais vu se battre,la rage au ventre,sans jamais se poser de question".
Son talent,joint à la rigueur de sa documentation,lui permettait de recréer une ambiance,des dialogues vrais,une émotion dans lesquels les anciens retrouvaient leur jeunesse et qui donnait aux
jeunes le goût d'égaler leurs aînés sous les armes.Plus que toutes les consécrations officielles de ses oeuvres,prix de l'Academie Française,Prix Poincaré,Claude Farrère,grand prix de la ville de
Bordeaux,prix du roman de la ville de Nancy,prix de la Société Géographie-Dupleix,prix Moncey,et pour finir prix Vauban décerné par l'Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale,autant que
de ses sept citations et de sa cravatte de Commandeur de la Légion d'Honneur,ce dont Erwan Bergot pouvait à bon droit se sentir fier,c'était de ce sentiment qu'il avait su faire naître dans le
coeur des jeunes générations pour l'armée française.Combien la lecture de ses ouvrages a-t-elle fait éclore de vocations?
Indéniablement,le capitaine en retraite Erwan Bergot,guerrier et écrivain,par sa fidélité et la qualité de son dévouement de plus de trente ans,méritait bien de parrainer une promotion de jeunes
officiers.Pour reprendre deux titres de ses romans,après avoir été lui-même,avec combien d'ardeur,"le flambeau",il était juste qu'il soit désigné,amical,modeste,chaleureux et fraternel,pour
transmettre"l'Héritage".
Promotion capitaine Bergot:Année 1993,de l'école d'application de l'infanterie(EAI)
insigne nr 4136.
En 1983-photo de la troisième journée du livre combattant organisée au Beffroi de Thionville et à laquelle participait Erwan Bergot.La section était alors dirigée par le président Jean-Claude Houlne.
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